La reconnaissance en 2017, par les Etats-Unis, de Jérusalem comme capitale d’Israël, puis le plan Trump de 2020 qui prolonge la politique de colonisation par l’annexion de la vallée du Jourdain –initiatives toutes deux contraires aux résolutions des Nations-Unies-, n’ont guère suscité de réactions dans la communauté internationale. Les accords dits d’Abraham, conclus entre Israël et un certain nombre de pays arabes –des Emirats au Maroc- ont même été salués par nombre d’observateurs comme une avancée considérable vers la paix au Proche-Orient. Certains, ignorant délibérément les réalités d’un apartheid de fait, ont même prétendu y voir le premier pas vers un Etat unifié qui garantirait à tous la démocratie et l’égalité des droits…
Alors qu’elle avait toujours soutenu, du moins dans le principe, la cause palestinienne et alors que le ministre des Affaires Etrangères, Jean-Yves Le Drian, avait été lui-même, jadis, l’un des fondateurs du groupe d’études sur la Palestine à l’Assemblée Nationale, la France est restée anormalement passive, suscitant même l’indignation de ses anciens diplomates[1].
La volonté israélienne de parachever l’annexion de Jérusalem s’est affirmée sans frein dans les premiers mois de 2021 : interdiction de toute forme de vote lors des élections prévues par les Palestiniens –ce qui a donné un prétexte au président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, pour les reporter-, volonté d’expulser les familles palestiniennes du quartier de Cheikh Jarrah, brimades répétées à l’égard des Palestiniens qui voulaient se rendre dans la vieille ville et sur l’esplanade des mosquées pendant le Ramadan. Elle a ravivé la révolte des Palestiniens que beaucoup croyaient étouffée par la faiblesse de l’Autorité palestinienne en Cisjordanie, par la surpopulation et la démoralisation liée au blocus dans la bande de Gaza. Elle a provoqué la réaction du Hamas qui s’est posé en garant de la résistance palestinienne. Beaucoup s’en sont émus, mais si l’on doit condamner la violence du Hamas, on doit aussi condamner la violence continue des Israéliens.
Dans le même temps, de nombreux Palestiniens de Cisjordanie –dont beaucoup se reconnaissent dans le leader emprisonné en Israël, Marwan Barghouti, et dans le neveu de Yasser Arafat, Nasser-al-Kidwa, ont réaffirmé leur volonté de défendre leurs droits. Dans nombre de villes, à l’intérieur même d’Israël, les Arabes israéliens ont dénoncé le sort qui leur est imposé et affirmé leur solidarité avec l’ensemble des Palestiniens.
La communauté internationale n’a eu de cesse –ce qui était légitime- de demander la fin des affrontements. Pour autant, elle ne propose, à ce jour, ni solution ni processus permettant de reconnaître les droits légitimes des deux parties, et notamment la reconnaissance d’un Etat palestinien cohérent et viable.
Cette attitude est totalement irresponsable. On ne peut pas indéfiniment mépriser les espoirs de libération de tout un peuple.
[1] Yves Aubin de la Messuzière : Sur le continent israélo-palestinien, la voix de la France s’est éteinte – Le Monde du 4 février 2021.